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Une contrelettre de mission adressée à Christine Albanel par des citoyens libres

mardi 30 octobre 2007, par AgC | Imprimer Imprimer |
Dernière modification : samedi 6 février 2010 à 14:15



Contre-lettre de mission adressée à Mme Christine Albanel,
Ministre de la Culture et de la communication.

- Le 1er août dernier, le Président de la république et le Premier ministre adressaient à la ministre de la Culture et de la Communication une lettre de mission, indiquant les grandes lignes ( et nombre détails ) sur ce qu’ils souhaitent voir mis en oeuvre dans le domaine culturel.
Outre sa forme, qui multiplie les injonctions, plusieurs éléments de cette missive apparaissent particulièrement discutables.
Professionnels, militants, acteurs de l’action culturelle, nous avons donc décidé de verser au débat public une contrelettre citoyenne, dont la première version est volontairement basée sur une réécriture partielle de l’existante.

Les premiers signataires de *la contre-lettre* sont *Jean-Gabriel Carasso*, auteur, *Eric Fourreau*, directeur des éditions de l’Attribut, *Robin Renucci*, comédien, *Cécil Guitart*, maire-adjoint de Grenoble, *Jean-Claude Lallias*, professeur de lettres, *Alain Lievaux*, directeur du CRL Centre, *Philippe Meirieu*, Professeur à l’université de Lyon, *Catherine Dasté*, metteur en scène, *Marc Le Glatin*, comédien, directeur du Théâtre de Chelles, *Jean-Sébastien Steil*, coordinateur de réseau européen d’espace public ...

- Lire la contrelettre et l’originale écrite par Sarkozy côte à côte, source de cet article sur : http://lacontrelettre.over-blog.com/

- Ajouter votre signature par courriel

- Voir les signataires

Note :
- Les modifications initiales sont en rouge.
- Les nouvelles propositions sont en bleu.

CITOYENS LIBRES
Paris, le 15 octobre 2007

Madame la Ministre,

Les campagnes pour l’élection présidentielle et les élections législatives qui viennent d’avoir lieu dans notre pays ont démontré le désintérêt manifesté une fois encore par de nombreuses forces politiques et médiatiques, pour les questions artistiques et culturelles. En élisant au Parlement une large majorité présidentielle, les Français ont donné au gouvernement, tous les outils nécessaires à la réussite de sa mission. Ce gouvernement, auquel vous appartenez, n’a désormais qu’un seul devoir : celui de mettre en oeuvre un programme artistique et culturel cohérent avec nos engagements internationaux en matière de diversité culturelle, hors des corporatismes et des influences commerciales, afin notamment de réconcilier nos compatriotes avec l’action artistique et culturelle.

Tout au long de la campagne présidentielle, quelques thèmes majeurs ont été évoqués dans le débat public traitant de vos compétences ministérielles ; nous attendons de vous que vous les repreniez dans vos propositions et dans vos actions. L’objet de cette contre-lettre de mission citoyenne et républicaine est de vous préciser les points qui, parmi ces thèmes, nous paraissent prioritaires et sur lesquels nous vous demandons de vous engager résolument, en concertation étroite avec toutes les forces vives concernées.

En 1959, André Malraux définissait ainsi les missions du nouveau ministère des affaires culturelles : « rendre accessibles au plus grand nombre possible les oeuvres capitales de l’humanité, assurer la plus vaste audience à notre patrimoine culturel et favoriser la création des oeuvres de l’art et de l’esprit qui l’enrichissent ». Signe de leur pertinence et de leur permanence, ces missions s’incarnent un demi-siècle plus tard dans les nouveaux « programmes » du ministère (patrimoine, création, transmission des savoirs).

Après l’ère Malraux, qui en vérité ne s’est jamais achevée totalement, un second cycle politique incarné principalement par le ministre Jack Lang, a conduit dans les années 1980 à une forte croissance des moyens d’intervention du ministère (budget, aides fiscales et réglementaires comme le prix unique du livre), permettant de valoriser et de soutenir des formes artistiques toujours plus diverses, et se traduisant par le lancement de plusieurs « grands projets ».

Les acquis de cette politique sont considérables : une offre artistique foisonnante, un patrimoine riche des musées et des monuments rénovés, un cinéma rivalisant avec la production internationale, un maillage du territoire en équipements et manifestations de toutes sortes, un engagement considérable des collectivités territoriales.... Ces succès ne doivent cependant pas faire oublier certaines lacunes et de fortes insuffisances eu égard aux exigences de la démocratie : un déséquilibre persistant entre Paris et les régions, une politique d’addition de guichets et de projets au détriment de la cohérence d’ensemble, une prise en compte insuffisante de la diversité culturelle des populations et de la sensibilisation des publics, un faible renouvellement sociologique des personnes fréquentant les lieux culturels. Aujourd’hui, notre politique culturelle apparaît comme l’une des moins redistributives de notre pays. Financée par l’argent de tous, elle ne bénéficie qu’à un nombre restreint de nos compatriotes.

L’environnement dans lequel s’inscrit la politique culturelle est par ailleurs en pleine transformation. La révolution numérique crée une possibilité d’accès quasi infini à certaines oeuvres de l’esprit, tout en perturbant profondément l’économie de la création et de la diffusion dans de nombreux domaines. Et les industries culturelles sont de leur côté à l’origine d’une part croissante de la richesse et de l’emploi en même temps qu’elles pèsent, de manière trop souvent hégémonique, sur la notion même de culture, confondant les « oeuvres » et les « produits », le projet artistique et l’impératif de rentabilité financière.

L’heure d’un nouveau souffle pour notre politique culturelle est donc venue, celle d’adapter l’ambition d’André Malraux au XXIème siècle et à la complexité du monde qui nous entoure. Il vous revient de proposer les voies et moyens d’une politique culturelle nouvelle, audacieuse, soucieuse de favoriser réellement l’égalité des chances, d’élargir les conditions de fréquentation des lieux culturels, de prendre en compte l’ensemble des expressions artistiques ou de création, d’assurer aux artistes une reconnaissance et une rémunération de leur travail, de développer la création et l’appropriation des oeuvres par les populations les plus larges et les plus diversifiées, notamment les plus jeunes, de mettre en oeuvre enfin la « diversité culturelle » définie dans les textes de l’UNESCO signés par la France, ainsi que la « démocratie artistique et culturelle » dont notre pays a tant besoin..

Votre première mission sera en effet de poursuivre ce double objectif de « diversité et de démocratie artistique et culturelle » dans toutes ses composantes.

Nous souhaitons d’abord, qu’avec le ministre de l’Education nationale, vous fassiez de l’éducation culturelle et artistique à l’école une priorité véritable de votre action en faisant tomber, pour cela, la barrière qui s’est progressivement dressée entre le monde éducatif, celui de la jeunesse, et le monde de la culture du fait, notamment, de la séparation des différents ministères concernés.
L’école doit permettre à tous les élèves d’acquérir les attitudes culturelles fondamentales leur permettant de découvrir et d’aimer l’histoire, la langue et le patrimoine littéraire ainsi que la création artistique de notre pays, de l’Europe et du monde, condition pour vivre en homme ou en femme libre, pour apprécier et s’exprimer, tout au long de leur vie, par l’art, le spectacle, la littérature, et toutes les autres formes de pratiques culturelles.
Nous pensons que la création d’un enseignement d’histoire de l’art ne peut constituer le support de cette éducation culturelle que si tous les enfants, durant l’ensemble de leur scolarité, peuvent d’abord avoir une pratique artistique effective, d’acteur et de spectateur, en diversifiant les possibilités et en favorisant les pratiques collectives. Une action spécifique devra être menée dans le domaine de « l’éducation à l’image » et de la distance critique indispensable face au déferlement audiovisuel imposé chaque jour aux « jeunes cerveaux disponibles ». Chaque établissement scolaire devrait établir un « projet artistique et culturel » en fonction de son environnement, et nouer si possible des liens privilégiés avec un ou plusieurs établissements culturels de son territoire. Vous favoriserez pour cela la formation des professionnels de la culture, médiateurs et artistes volontaires qui souhaitent s’engager ou développer dans ces actions partenariales.
Enfin, vous veillerez à ce que les établissements scolaires reçoivent régulièrement des oeuvres de haute qualité sur support numérique, appareillées et accompagnées de compléments documentaires qui en facilitent l’approche (Grandes expositions, Chorégraphies, Films de théâtre, Portraits d’artistes, Archives documentaires de la télévision publique...). La création de telles médiathèques de ressources, adaptées à la transmission en direction des jeunes est un facteur de rentabilité des crédits publics de soutien à la création. Les grandes institutions culturelles (Théâtres nationaux, Centres dramatiques, Musées nationaux, Opéra) en lien avec les producteurs audiovisuels (chaînes publiques, éditeurs numériques) devront participer à cet effort de diffusion et de libre accès aux oeuvres crées et représentées.

La mise en oeuvre de cette politique d’éducation culturelle et artistique suppose un partenariat renouvelé et durable entre votre ministère et celui de l’Education nationale ainsi que celui de la jeunesse, afin que les administrations et le monde de l’éducation se rapprochent de ceux de la culture. Avec le ministre de l’Education, vous étudierez les modalités de ce partenariat pérenne, qui associera les collectivités locales en vous appuyant sur les très riches expériences qui existent déjà dans notre pays. Vous organiserez pour cela un « Grenelle de l’éducation artistique et culturelle » permettant d’associer le plus grand nombre de partenaires à la définition de cette nouvelle politique.

L’accès aux oeuvres de l’esprit passe de plus en plus, par la médiation audiovisuelle. A la télévision comme à l’école, la culture doit être davantage présente dans les programmes.
France Télévisions doit fortement affirmer son identité de service public à travers une offre culturelle plus dense, plus créative, plus audacieuse ; une offre qui marque une plus grande différence avec les chaînes privées ; une offre fondée sur des programmes populaires de qualité aux heures de grande écoute et un accompagnement résolu des artistes par des portraits, reportages, documentaires et informations multiples sur leurs travaux, incitant les spectateurs à aller à leur rencontre. Un cahier des charges rénové, qui évitera la référence unique à l’audimat, sera rédigé pour encadrer les activités et préciser les identités des différentes chaînes de France Télévisions.

Radio France devra également poursuivre sa modernisation et promouvoir la diversité éditoriale, culturelle et musicale. S’agissant des radios privées, vous dresserez avec le CSA un bilan des règles applicables en matière de quotas et proposerez des aménagements permettant d’améliorer l’exposition de toutes les musiques comme l’accompagnement des événements artistiques et culturels.
Quant à la révolution numérique, elle doit être l’occasion de conduire un public toujours plus nombreux vers le patrimoine culturel français et de langue française, et vers la création contemporaine. L’Etat peut l’encourager par la mise à disposition gratuite, sur Internet, du patrimoine public ou financé par des fonds publics, et par l’incitation à la diffusion numérique croissante de contenus culturels privilégiant des solutions innovantes, interactives et éducatives. L’INA devrait être associé fortement à cette diffusion et lever les obstacles (financiers notamment) qui freinent cette action.

La gratuité des musées nationaux a été évoquée lors de la campagne présidentielle. Vous conduirez une expérimentation de la gratuité avec un échantillon significatif d’établissements, en évitant de confondre la gratuité du coût avec la gratuité du sens. Il importe en effet que l’acte culturel conserve, pour chacun, un sens et des valeurs qui ne sauraient se diluer dans une pratique strictement consumériste. Cette gratuité devra donc être accompagnée d’actions spécifiques de sensibilisation et de médiation que vous expérimenterez avec les professionnels concernés. Vous abandonnerez cette initiative si, comme cela semble probable, elle s’avère démagogique et sans effet véritable.

Vous étudierez à l’échelon de l’Union européenne, en profitant à cet effet de la présidence française de l’Union au second semestre de l’année 2008, toutes convergences possibles d’actions de création, de diffusion et de circulation des oeuvres et des publics, notamment pour les jeunes et les « seniors », par exemple un droit de visite gratuit aux sites les plus remarquables du patrimoine européen. Cette proposition sera faite par la France à l’ensemble de nos partenaires européens.

Vous vous appuierez sur toutes les forces vives compétentes (professionnels, associations d’éducation populaire, syndicats, comités d’entreprises...) pour faire venir à la culture des publics qui en sont aujourd’hui éloignés. Avec un renouvellement des pratiques d’action culturelle, vous expertiserez la proposition d’un « chèque culture » remis aux familles les plus défavorisées pour leur permettre d’accéder aux équipements culturels de leur choix, là encore, en évitant de confondre la gratuité du coût avec la gratuité du sens.

La démocratie artistique et culturelle, c’est enfin veiller à ce que les aides publiques à la création, tout en tenant compte des attentes des publics, permettent un soutien clairement affirmé à la recherche, à l’innovation et aux formes de création les moins inféodées aux canons académiques ou aux productions strictement commerciales. Vous réformerez à cette fin les conditions d’attribution des aides en créant des commissions décentralisées indépendantes d’attribution associant des experts, des artistes, des élus et des représentants des médiateurs et des associations qui oeuvrent en direction du public. Les travaux de ces commissions devront faire l’objet d’un compte-rendu public afin que les critères de choix puissent être connus de tous, par exemple lors de « conférences régionales de la culture » qui pourraient se réunir régulièrement.
Vous exigerez de chaque structure subventionnée, qu’elle rende compte de son action et de la pertinence de ses interventions, au regard du projet artistique et culturel de chacune.
Vous éviterez de leur fixer des obligations de résultats trop contraignantes et uniquement basées sur des critères quantitatifs, mais travaillerez avec chacune à une méthodologie d’évaluation nouvelle et rigoureuse. Vous empêcherez la reconduction automatique des aides et des subventions, dès lors qu’un projet ou qu’une structure aurait démontré un essoufflement manifeste, en inscrivant chaque projet dans une temporalité prévue en amont. Pour autant, vous resterez attentive à l’importance de la durée dans un processus artistique et culturel et éviterez de précariser les acteurs qui s’y engagent.
Dans le même esprit, et de manière alternative, vous examinerez dans quelle mesure le dispositif d’aide à la production cinématographique, qui repose en partie sur le succès public des oeuvres subventionnées, pourrait être appliqué en partie au théâtre, ce qui n’interdit pas de le moderniser par ailleurs.

Deux secteurs traversent actuellement une crise particulièrement grave. Ils devront mobiliser particulièrement votre ministère.

Nous souhaitons que soit conduit dans les plus brefs délais un plan de sauvetage de l’industrie musicale et, plus largement, de protection et de promotion des industries culturelles couvertes par les droits d’auteur et droits voisins, sans pour autant vous laisser abuser par les groupes de pression de ce domaine. Ce plan devra être mené avec la ministre de l’Economie, des finances et de l’emploi, et s’appuyer sur trois volets : la montée en puissance d’une offre numérique diversifiée, bon marché et simple d’utilisation ; la mise en place rapide d’une licence globale ou de tout autre mécanisme similaire, permettant d’en finir avec la prétendu « piraterie » de notre jeunesse ; l’aide à l’adaptation des structures et modèles économiques des industries concernées.
A cette fin, vous favoriserez la mise à disposition du public d’offres commerciales attractives de musique, de films et de toutes les formes de création enregistrée sur les nouveaux réseaux fixes et mobiles. La chronologie des médias doit d’urgence poursuivre son adaptation. Vous inciterez les titulaires de catalogues à numériser leurs oeuvres et à les distribuer sur tous les supports. Vous ferez de l’interopérabilité une priorité majeure. Parallèlement, vous rechercherez voies et moyens pour conclure un accord interprofessionnel permettant de dissuader efficacement et de réprimer la contrefaçon de masse. Les solutions techniques et économiques existent, elles doivent être expérimentées et mises en oeuvre. Vous nous proposerez les mesures d’accompagnement utiles à la sauvegarde et à la transition des industries culturelles vers de nouveaux modèles de développement et de croissance. Vous préparerez donc une révision de la loi DADVSI, pour permettre à notre pays d’être en position pionnière en pour la défense des internautes, la diffusion de contenus numériques, la promotion de l’interopérabilité et la responsabilité des acteurs de l’Internet.

Par ailleurs, vous prendrez les dispositions nécessaires pour permettre à la presse quotidienne de sortir de la crise qu’elle traverse depuis des années, en particulier en ce qui concerne le régime de sa distribution et son adaptation à l’univers numérique.

Les Français sont, vous le savez, très attachés à notre patrimoine. Vous poursuivrez l’effort de remise à niveau des crédits alloués à la politique du patrimoine, vous vous efforcerez d’augmenter le nombre et monuments accessibles au public et poursuivrez la politique d’animation territoriale qui avait été instaurée dans plusieurs d’entre eux, avec grand succès.

Vous éviterez pour cela de dépenser trop de moyens pour un centre de recherche et de collections permanentes dédié à l’histoire civile et militaire de la France. De même, en prévision des soixante-dix ans de l’appel du Général de Gaulle (2010), vous vous abstiendrez du projet trop ambitieux de mémorial de la résistance et de la France libre, en hommage à tous les résistants. Leurs témoignages, histoires, récits et mémoires, pourraient être simplement collectés puis réunis dans un DVD qui serait remis gratuitement à tous les enfants de France, le jour de la lecture de la lettre de Guy Môquet. Une grande émission de télévision sur le thème « Résister » pourrait accompagner cette journée nationale.

En lien avec le ministre des Affaires étrangères et européennes, nous vous demandons de moderniser en profondeur l’action culturelle extérieure de la France. Nous souhaitons que la France soit plus déterminée à promouvoir sa langue, sa culture et ses artistes à travers le monde de même qu’elle entend accueillir, dans les conditions les plus dignes, les artistes du monde. Dans l’esprit de la convention de 2005 sur la diversité culturelle, voulue par la France dans le cadre de l’UNESCO, vous donnerez priorité à la coopération et au développement des industries culturelles des pays les plus pauvres.

Vous appuierez l’effort de rationalisation des structures de la politique culturelle extérieure de la France demandé au ministre Affaires étrangères et européennes, afin que cette politique gagne en cohérence, en visibilité et en impulsion. Vous étudierez les moyens de mieux déployer nos implantations culturelles à l’étranger en fonction de la nouvelle géographie des zones d’influence et de création dans le monde, et des conséquences de l’intégration européenne sur l’étendue de notre réseau diplomatique et consulaire.
Vous proposerez notamment à toutes les institutions et structures culturelles subventionnées, en accord avec les collectivités territoriales, d’être jumelées avec des structures correspondantes du même domaine d’activité, dans un pays d’Afrique ou d’Europe.

A partir d’une étude définissant nos objectifs selon les différentes parties du monde, vous élaborerez un schéma de réorganisation et de rationalisation des instruments de la politique audiovisuelle extérieure la France pour une présence audiovisuelle plus forte, plus cohérente, plus ambitieuse, plus efficace.

De même, nous voulons que la France joue un rôle majeur dans l’accueil et la formation des futures élites culturelles et artistiques des pays étrangers. Vous prendrez les dispositions nécessaires pour les attirer en France créer des liens étroits et durables entre ces élites et nos artistes. Par ailleurs, vous rechercherez des collaborations européennes et internationales (principalement avec les pays du Sud) dans le domaine de l’enseignement artistique supérieur.

Si elle ne saurait être soumise aux seules lois de l’argent et du profit, la culture n’en est pas moins de plus en plus une source d’emplois et de richesses. Nous ne pouvons que nous réjouir de ce que les Français dépensent plus qu’autrefois en matière culturelle. Nous devons également prendre conscience que les industries culturelles sont l’objet d’une lutte d’influence entre plusieurs pays dans le monde et que les enjeux ne sont pas seulement économiques, mais aussi idéologiques, identitaires et d’émancipation.

C’est pourquoi vous prendrez toutes les dispositions nécessaires pour donner à nos industries culturelles les meilleures chances de se développer ou de se renforcer, et à l’image du cinéma français dont le succès est incontestable, ou de la politique du livre qui globalement remplit ses objectifs, vous consoliderez l’action des pouvoirs publics au service de l’indépendance et de la prospérité de ces industries.

Dans le cadre d’une renégociation de la sixième directive TVA, qui sera pilotée par la ministre de l’Economie, des finances et de l’emploi, vous vous efforcerez d’obtenir le droit pour notre pays d’appliquer un taux de TVA réduit à l’ensemble de nos biens culturels, dans l’univers physique comme sur les réseaux.

A l’issue d’une réflexion stratégique associant tous les acteurs et couvrant tous les sujets, vous nous proposerez, avec la ministre de l’Economie, des finances et de l’emploi, une remise à plat des dispositions législatives et réglementaires qui s’appliquent au secteur de l’audiovisuel. En tenant compte de la nouvelle donne du marché comme des exigences de la création, l’objectif doit être de supprimer les incohérences croissantes de la législation actuelle et de permettre l’émergence de groupes de communication audiovisuelle français de premier plan, capables de structurer une industrie française puissante des contenus et d’affronter les nouveaux défis liés à la multiplication des canaux de distribution.

Vous accorderez une attention particulière aux arts numériques interactifs. La France dispose d’un capital humain recherché et de sociétés créatives dans le domaine du jeu vidéo et nous souhaitons que ce secteur soit intégré dans vos priorités.

Vous prendrez les dispositions nécessaires pour redresser rapidement le marché de l’art français. Vous analyserez notamment sa situation juridique et fiscale (TVA, droit de suite...) au regard de la situation dans les autres pays, et ferez des propositions d’amélioration. Vous examinerez les raisons qui freinent la reconnaissance des talents français à l’étranger. Vous évaluerez, avec les professionnels concernés, la pertinence de l’organisation des commandes d’art (FNAC et FRAC) et vous abstiendrez de poursuivre l’étude contre nature de la possibilité pour les opérateurs publics d’aliéner des oeuvres de leurs collections, sans, soi-disant, compromettre le patrimoine de la Nation.

Vous poursuivrez la réflexion quant au régime d’indemnisation du chômage des artistes et techniciens du spectacle vivant et de l’audiovisuel, évaluerez rapidement la réalité des faits engendrés par la mise en oeuvre du dernier protocole et proposerez des solutions innovantes pour la reconnaissance et la dignité de ces milieux artistiques.

Vous réfléchirez notamment à l’élargissement de ce statut aux artistes plasticiens, écrivains, photographes...

Enfin, vous nous proposerez un pilotage rénové de l’organisation de la profession d’architecte et de son enseignement en mettant en oeuvre une véritable insertion professionnelle des jeunes diplômés dans des conditions économiques acceptables pour les entreprises d’architecture et un temps nécessaire à cet apprentissage et vous veillerez à favoriser la diffusion de l’architecture contemporaine et sa prise en compte dans les programmes d’urbanisme et de construction en permettant les conditions d’émergence d’une architecture et d’un urbanisme de qualité en limitant, notamment, le recours au partenariat public privé à de rares exceptions, prenant en compte de la sorte le retour d’expérience sur plusieurs décennies des pays anglo-saxons.

Pour réaliser ces missions et mettre en oeuvre ces priorités, vous devrez disposer d’une administration rénovée, moderne, et dégager des marges de manoeuvre accrues. Nous souhaitons que les dépenses de fonctionnement du ministère et de ses organismes rattachés, dès lors qu’ils auront été sérieusement évalués, soient réduites au profit de l’aide à la création et à la diversité culturelle.

Sans qu’ils se substituent aux financements publics, vous encouragerez le financement privé de la culture, en étendant encore d’avantage les avantages alloués en faveur du mécénat et des fondations, en favorisant l’extension du mécénat à la politique de sauvegarde du patrimoine, en sachant toutefois que seuls les grands établissements pourront trouver dans la recherche de mécènes un complément (toujours modeste) à leurs financements.
A la tête de tous les établissements et administrations relevant de votre autorité, vous veillerez à associer des personnalités d’envergure du monde culturel et artistique à des gestionnaires confirmés, comme cela se fait déjà dans de très nombreuses structures.

Vous le savez, le programme gouvernemental devra être mis en oeuvre en respectant scrupuleusement la responsabilité républicaine de préserver l’avenir des générations futures grâce à une gestion rigoureuse des finances publiques, conforme aux engagements européens et composante essentielle de la démocratie irréprochable que le gouvernement prétend mettre en place.

Réussir les réformes attendues par Français et cesser la spirale de l’endettement ne sont nullement inconciliables, mais sont au contraire deux objectifs complémentaires dès lors qu’il est décidé de substituer véritablement l’intérêt général aux intérêts particuliers de quelques-uns. Répartir la pénurie est aussi absurde et inefficace que laisser courir la dette publique. Si nous voulons modifier en profondeur les structures et les modes d’intervention des administrations publiques, c’est pour que chaque euro dépensé soit un euro utile et que le potentiel humain inestimable de notre administration soit beaucoup mieux valorisé.

Prochainement, une révision générale des politiques publiques sera entreprise.

L’objet de cette révision générale sera de passer en revue, avec la collaboration, naturellement, des ministres concernés comme des principaux acteurs de chaque domaine, chacune des politiques publiques et des interventions mises en oeuvre par les administrations publiques, d’en évaluer les résultats et de décider des réformes nécessaires pour améliorer la qualité du service public rendu aux Français. Nous vous demandons d’organiser, à cet effet, la plus grande concertation sur ces thèmes, en vue d’initier une politique nouvelle (stratégie, finalités, indicateurs) véritablement élaborée et construite conjointement par les acteurs, les citoyens, les élus ... Seule une telle démarche démocratique permettra de rendre cette politique plus efficace et moins coûteuse, et surtout de réallouer les moyens publics des politiques inutiles ou inefficaces au profit des politiques qui sont nécessaires.

Une attention particulière sera portée aux domaines de l’éducation, de la santé, de la culture et de l’environnement, dont la dimension de « bien commun » appelle un engagement rénové et pérenne de la puissance publique.

Nous vous demandons de vous impliquer personnellement dans cet exercice sans pour autant remettre aucunement en cause le sens même de la mission que la présente lettre vous confie. Nous insistons sur le fait qu’un bon ministre ne se reconnaîtra pas (seulement) à la progression de ses crédits, mais à la définition des ses objectifs, à sa capacité à innover et à mobiliser les forces vives et à préparer l’avenir culturel de notre pays.

Sur l’ensemble des points de cette lettre de mission, nous sommes à votre disposition pour vous proposer des méthodes d’évaluation conjointe, que nous ne confondront pas avec une simple approche comptable ou statistique des données.

Nous ferons le point chaque année de l’avancement de votre mission et des commentaires qu’il convient, le cas échéant, de lui apporter.

Nous vous prions d’agréer, Madame la Ministre, l’expression nos respectueux hommages démocratiques et républicains.

- Lire la contrelettre et l’originale écrite par Sarkozy côte à côte, source de cet article sur : http://lacontrelettre.over-blog.com/

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