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Star Academy - 01/ .. revue de presse du 29 septembre 2007 : Les intermittents, les juges et la "Star Ac’, Les intrus de la « Star Ac » déchantent, ..

dimanche 30 septembre 2007, par AgC
Dernière modification : mercredi 20 août 2014

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Les intermittents, les juges et la « Star Ac’ »
LE MONDE | 29.09.07 | 15h52 • Mis à jour le 29.09.07 | 15h52

Il est 20h54, samedi 18 octobre 2003. L’émission de variétés en prime time de TF1 « Star Academy » vient de commencer. Devant l’entrée principale du studio, à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), plusieurs dizaines d’intermittents essaient de forcer la porte vitrée, tandis que des agents de sécurité font bloc de l’autre côté. « Comment vous pouvez imaginer que vous alliez entrer sans faire de la casse ? », s’interroge, vendredi 28 septembre, la présidente de la 14e chambre du tribunal correctionnel de Bobigny, Catherine Feyler-Sapene. Et ce « caillou », insiste-t-elle, P. l’a-t-il jeté dans la porte pour la casser ? « Pure invention », répond l’intéressé.

L’audience ressemble à une reconstitution des faits. Durant six heures, le film de « l’occupation des studios de la Star Ac’ » repasse en boucle. Raconté à plusieurs voix, pas toujours concordantes. La porte qui finit par « exploser ». La bagarre avec les « gros bras » à l’intérieur. « Il m’a dit, je vais te tuer ! », témoigne le chef des agents de sécurité, en se tournant vers l’un des prévenus, qui secoue la tête. La bousculade avec la mystérieuse hôtesse dont on finit par apprendre qu’elle est « agent de sécurité féminin ». L’acharnement contre la caméra d’un intermittent qui a filmé l’action. L’arrivée sur le plateau « à 21 h 07 ». L’arrêt de l’émission et la perte de « 2 millions d’euros » de recettes publicitaires invoquée par TF1.

Au final, deux blessés, quelques interruptions temporaires de travail et quatre personnes mises en examen : Dominique Collignon, Olivier Pousset, P. et Thierry Levare. Presque quatre ans plus tard, ils comparaissent pour « entrave à la liberté du travail ». L’un d’entre eux se voit reprocher, en plus, des « menaces de mort » à l’encontre d’un agent, un autre des « violences » commises sur une personne. L’avocat de Dominique Collignon estime que la qualification d’« entrave à la liberté du travail » n’est pas pertinente en l’espèce.

« Prenez l’ensemble du dossier et pas seulement quelques otages ! », a plaidé Me François Roux, qui défend la « comparution volontaire » de trente et un intermittents qui ont participé à l’action et demandent à être entendus par la justice - comme les faucheurs volontaires d’OGM. Depuis l’estrade, le procureur Rémi Chaise dénonce une démarche « tardive » : « Que ne se sont-ils manifestés dès le déclenchement de l’enquête de police ? » Venu en qualité de « grand témoin », le sénateur communiste Jack Ralite resitue l’occupation dans le contexte du conflit des intermittents, déclenché par la signature, en juin 2003, d’une réforme de l’assurance-chômage des artistes et des techniciens du spectacle jugée inéquitable. Pourquoi la « Star Ac’ » ? Parce que, pour les intermittents, l’émission est le symbole de la marchandisation de la culture et que son producteur, Endemol, est alors connu pour abuser du système de l’intermittence. Durant cette « semaine morte » de la culture, en octobre 2003, toutes les actions se sont bien passées, sauf celle-là, rappelle Jean Voirin de la CGT-spectacle. Le procureur a requis entre un et quatre mois d’emprisonnement avec sursis.

Jugement le 16 novembre.

Clarisse Fabre
Article paru dans l’édition du 30.09.07.

Source : Le Monde, ici

Les intrus de la « Star Ac » déchantent
En 2003, des intermittents en lutte interrompaient l’émission. Ils comparaissaient vendredi.
Par AMELIA BLANCHOT
QUOTIDIEN : samedi 29 septembre 2007

C’était le samedi 18 octobre 2003. Les intermittents du spectacl manifestent depuis des mois contre le nouveau protocole de l’Unédic. Il multiplient les actions coup-de-poing. Ce soir-là, le rendez-vous est donn au 45, avenue Victor-Hugo, à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis). L’adresse entre autres - du plateau de la Star Academy. Un premier groupe, d’une vingtaine de personnes, débarque sur le prime, tourné en direct. Interloqué, Nikos Aliagas, le présentateur, laisse la parole aux intermittents. Durant trois minutes top chrono, de 21 h 07 à 21h10. Puis, l’émission s’interrompt, laissant place à Julie Lescaut, le temps pour la production de gérer les envahisseurs du moment. Car ils sont une centaine à tenter d’entrer dans les studios. La situation dégénère rapidement : la porte est brisée, des coups partent, des personnes sont blessées, les forces de l’ordre arrivent sur les lieux. Parmi cette foule d’intermittents, quatre ont été repérés par le responsable de la sécurité des locaux.

Ils comparaissaient vendredi devant la 14 e chambre du tribunal correctionnel de Bobigny. Même chef d’accusation : « entrave concertée à la liberté d’expression et du travail avec destruction ou dégradation ». T., un des prévenus, comparaît également pour « menace de mort réitérée » et P. pour « violence commise en réunion ». Ils sont venus en bonne compagnie.

« Réponse. » Pour l’occasion, 31 personnes se sont portées volontaires pour comparaître. Elles sont toutes présentes à l’audience. Me Roux, leur avocat, justifie leur mobilisation : « C’est une réponse des mouvements sociaux aux atteintes des parquets, qui imaginent qu’ils peuvent squeezer les débats. » Le procureur, M. Chaise, évoque « une démarche courageuse, mais tardive, et hasardeuse sur le plan juridique ». Qu’importe, l’avocat a déposé ses conclusions, ils sont donc « juridiquement présents » . C’est donc une salle pleine à craquer qui a assisté à l’audience.

Les quatre prévenus sont appelés à la barre. Sagement alignés, les mains dans le dos, ils répondent aux questions. Précisent le contexte : « C’était une époque où nous résistions à un protocole inédit et inégalitaire », affirme D. « On n’était pas là pour être violents, surtout face à des gens de 200 kg », s’est défendu T., accusé d’avoir menacé de mort un vigile. P. aurait violemment agressé une agente de la sécurité. Il explique à la présidente : « Elle essayait de prendre mon appareil photo. Je veux bien tout accepter, ma présence notamment, mais pas ma violence. » Visiblement, les vigiles interdisaient tout enregistrement d’images. La présidente du tribunal, Mme Feyler-Sapene, se demande pourquoi. Ordre de la production, répondra la société de sécurité. Si TF1 et la société de production Endemol ont retiré leur plainte, le responsable de la sécurité est tout de même venu témoigner. « Ils sont rentrés violemment dans le hall, nous n’avons fait que répondre à leur provocation. » Avant d’ajouter : « J’ai reconnu les quatre, ils étaient devant, c’étaient les plus virulents, ils criaient. » Il les a donc dénoncés. A l’audience, il a précisé que l’effectif de ses vigiles avait été porté à cinquante au lieu de trente, suite à des rumeurs entendues sur la présence des intermittents.

Choeur. La présidente interroge les accusés : « Comment vous pouviez vous imaginer entrer sans violence ? Comment cela se passe d’habitude ? » « Tranquillement », répondent presque en choeur les quatre prévenus , évoquant d’autres intrusions sur des plateaux, toutes réussies, et dans le calme. Le procureur a requis un mois avec sursis pour O. et D., deux mois avec sursis pour T., et quatre mois avec sursis pour P. Le jugement est mis en délibéré au 16 novembre.

 
Source : Libération, ici